• August Wilhelm von Schlegel to Anne Louise Germaine de Staël-Holstein

  • Place of Dispatch: Coppet · Place of Destination: Lyon · Date: 07.06.1809
Edition Status: Single collated printed full text with registry labelling
    Metadata Concerning Header
  • Sender: August Wilhelm von Schlegel
  • Recipient: Anne Louise Germaine de Staël-Holstein
  • Place of Dispatch: Coppet
  • Place of Destination: Lyon
  • Date: 07.06.1809
  • Notations: Empfangsort erschlossen.
    Printed Text
  • Bibliography: Pange, Pauline de: Auguste-Guillaume Schlegel et Madame de Staël d’apres des documents inédits. Paris 1938, S. 241‒243.
  • Incipit: „[Coppet] ce 7 juin 1809 [mercredi].
    Je vous écris, chère amie, quoique je n’aye presque rien à vous mander, sinon que j’ai [...]“
    Language
  • French
[Coppet] ce 7 juin 1809 [mercredi].
Je vous écris, chère amie, quoique je n’aye presque rien à vous mander, sinon que j’ai été extrêmement peiné de ne pas vous accompagner, que mes pensées et mes vœux pour que vous fassiez un heureux voyage sont continuellement auprès de vous, et que j’attends avec la plus grande impatience vos premières nouvelles. Nous avons de notre côté commencé notre vie solitaire, Alb[ert] et moi; je suis très content de lui jusqu’ici. Par surcroît de tristesse, il a fait un mauvais temps hier, de sorte que nous ne pûmes pas aller promener.
Nous avons eu quelques restes de visites qui vous étoient destinées. Lullin est venu ici quelques heures après votre départ; je l’ai rencontré à son retour. Il étoit tout joyeux et fulfild of hopes pour le rétablissement apparent de la santé de la personne pour laquelle vous savez qu’il s’intéresse, et je crois qu’il étoit venu principalement pour s’en réjouir en commun. Hier M. Louis de S.-Priest en allant à Lausanne a passé ici et déjeuné avec nous. Il me dit que Billy avoit eu une lettre de son frère qui est sain et sauf, mais qui se plaint d’avoir perdu un grand nombre de ses camarades. M. Seymour a voulu vous faire une visite; il s’en est allé tout de suite, ayant appris par Alb[ert] que vous étiez partie. Dans ce moment M. et Mme de Noailles me quittent; ils vont à Genève et n’ont resté qu’un instant. Ils se sont beaucoup informés de vous.
Voici deux lettres arrivées par le courrier suisse d’aujourd’hui. Je me figure que l’une a été retardée en chemin. On m’a remis à Genève l’annonce ci-jointe du mariage de Mlle Saladin. Je ne savois pas que cela dût avoir lieu de si tôt. C’est un coup fatal porté au sentiment d’Aug[uste].
Ce château est désert et inanimé. Je travaille toute la journée, faute de mieux. Je n’ai point encore de cheval pour faire des courses et aller voir nos voisins. Cela m’a empêché aussi de voir la revue des milices à Nyon, où l’on dit que M. de Prangins a paru comme un général d’armée, accompagné de deux aides de camp sur un cheval fringant et superbement harnaché, caracolant tout le long de son bataillon.
Les feuilles suisses d’aujourd’hui ne disent presque rien. M. de Watteville a envoyé un courrier à M. d’Affry. C’est ce qui a fait croire que les bataillons du second contingent, d’abord contrecommandés, devront encore marcher pour renforcer le cordon. Des personnes venant de Fribourg où se tient la diète ont prétendu sur des conjectures également vagues que M. de Wrede avait été appelé à une autre destination. Elles rapportent aussi qu’un nouveau combat avoit eu lieu sur le Danube le 29. Cela me paroît réfuté seulement par la date. Du reste, on n’en dit pas l’issue.
On s’étonne de ce que le change à Vienne ait haussé. Le 25 on le notait à 275 sur Augsbourg, et l’on attribue ce changement à des espérances favorables pour le crédit des billets de banque que l’Empereur de France auroit données.
Pour le moment il ne me vient pas autre chose dans l’esprit. Alb[ert] est allé avec Cachet à Satigny et à Genève; ils rapporteront sans doute des lettres. Pour moi je n’en ai aucune quelconque, mais je m’en passe plus facilement dans ce moment.
Mercredi soir. - Il n’est arrivé qu’une lettre pour nous, une pour M. de S. et deux pour Auguste. Deux épreuves arrivées sous bande pour M. Simonde: je les envoye de même aux soins de M. Couderc pour ne pas trop grossir ce paquet. Si M. Couderc, par hasard, ne savoit pas encore qu’il est avec vous, il faudroit les demander. Un manuscrut également pour M. Simonde est arrivé, sans timbre, je crois de Gesner, à Zurich. J’ai cru devoir le garder pour son prochain retour.
Faites mille amitiés de ma part à Aug[uste]. S’il est à Lyon, j’espère bien le voir retourner ici avec vous. Si vous avez atteint le but de votre voyage, je crains bien qu’ensuite les distractions vous laisseront bien peu de moments pour penser à moi et que vous ne vous apercevrez pas de mon absence. Le malheur est qu’avec moi il n’y à point d’inquiétude; quand même on m’auroit entièrement oublié, je suis comme une chose qu’on auroit perdu dans un endroit écarté, on est toujours sûr de la retrouver, quelque peu que l’on se presse.
Quand aurai-je une lettre de vous? J’espère demain. Celle-ci signifie bien peu de chose, il est tellement hors de mon pouvoir de vous faire du bien. Je vous écrirai de nouveau vendredi. Que le ciel vous prenne sous sa protection!
[Coppet] ce 7 juin 1809 [mercredi].
Je vous écris, chère amie, quoique je n’aye presque rien à vous mander, sinon que j’ai été extrêmement peiné de ne pas vous accompagner, que mes pensées et mes vœux pour que vous fassiez un heureux voyage sont continuellement auprès de vous, et que j’attends avec la plus grande impatience vos premières nouvelles. Nous avons de notre côté commencé notre vie solitaire, Alb[ert] et moi; je suis très content de lui jusqu’ici. Par surcroît de tristesse, il a fait un mauvais temps hier, de sorte que nous ne pûmes pas aller promener.
Nous avons eu quelques restes de visites qui vous étoient destinées. Lullin est venu ici quelques heures après votre départ; je l’ai rencontré à son retour. Il étoit tout joyeux et fulfild of hopes pour le rétablissement apparent de la santé de la personne pour laquelle vous savez qu’il s’intéresse, et je crois qu’il étoit venu principalement pour s’en réjouir en commun. Hier M. Louis de S.-Priest en allant à Lausanne a passé ici et déjeuné avec nous. Il me dit que Billy avoit eu une lettre de son frère qui est sain et sauf, mais qui se plaint d’avoir perdu un grand nombre de ses camarades. M. Seymour a voulu vous faire une visite; il s’en est allé tout de suite, ayant appris par Alb[ert] que vous étiez partie. Dans ce moment M. et Mme de Noailles me quittent; ils vont à Genève et n’ont resté qu’un instant. Ils se sont beaucoup informés de vous.
Voici deux lettres arrivées par le courrier suisse d’aujourd’hui. Je me figure que l’une a été retardée en chemin. On m’a remis à Genève l’annonce ci-jointe du mariage de Mlle Saladin. Je ne savois pas que cela dût avoir lieu de si tôt. C’est un coup fatal porté au sentiment d’Aug[uste].
Ce château est désert et inanimé. Je travaille toute la journée, faute de mieux. Je n’ai point encore de cheval pour faire des courses et aller voir nos voisins. Cela m’a empêché aussi de voir la revue des milices à Nyon, où l’on dit que M. de Prangins a paru comme un général d’armée, accompagné de deux aides de camp sur un cheval fringant et superbement harnaché, caracolant tout le long de son bataillon.
Les feuilles suisses d’aujourd’hui ne disent presque rien. M. de Watteville a envoyé un courrier à M. d’Affry. C’est ce qui a fait croire que les bataillons du second contingent, d’abord contrecommandés, devront encore marcher pour renforcer le cordon. Des personnes venant de Fribourg où se tient la diète ont prétendu sur des conjectures également vagues que M. de Wrede avait été appelé à une autre destination. Elles rapportent aussi qu’un nouveau combat avoit eu lieu sur le Danube le 29. Cela me paroît réfuté seulement par la date. Du reste, on n’en dit pas l’issue.
On s’étonne de ce que le change à Vienne ait haussé. Le 25 on le notait à 275 sur Augsbourg, et l’on attribue ce changement à des espérances favorables pour le crédit des billets de banque que l’Empereur de France auroit données.
Pour le moment il ne me vient pas autre chose dans l’esprit. Alb[ert] est allé avec Cachet à Satigny et à Genève; ils rapporteront sans doute des lettres. Pour moi je n’en ai aucune quelconque, mais je m’en passe plus facilement dans ce moment.
Mercredi soir. - Il n’est arrivé qu’une lettre pour nous, une pour M. de S. et deux pour Auguste. Deux épreuves arrivées sous bande pour M. Simonde: je les envoye de même aux soins de M. Couderc pour ne pas trop grossir ce paquet. Si M. Couderc, par hasard, ne savoit pas encore qu’il est avec vous, il faudroit les demander. Un manuscrut également pour M. Simonde est arrivé, sans timbre, je crois de Gesner, à Zurich. J’ai cru devoir le garder pour son prochain retour.
Faites mille amitiés de ma part à Aug[uste]. S’il est à Lyon, j’espère bien le voir retourner ici avec vous. Si vous avez atteint le but de votre voyage, je crains bien qu’ensuite les distractions vous laisseront bien peu de moments pour penser à moi et que vous ne vous apercevrez pas de mon absence. Le malheur est qu’avec moi il n’y à point d’inquiétude; quand même on m’auroit entièrement oublié, je suis comme une chose qu’on auroit perdu dans un endroit écarté, on est toujours sûr de la retrouver, quelque peu que l’on se presse.
Quand aurai-je une lettre de vous? J’espère demain. Celle-ci signifie bien peu de chose, il est tellement hors de mon pouvoir de vous faire du bien. Je vous écrirai de nouveau vendredi. Que le ciel vous prenne sous sa protection!
· Übersetzung , 07.06.1809
· Pange, Pauline de: August Wilhelm Schlegel und Frau von Staël. Eine schicksalhafte Begegnung. Nach unveröffentlichten Briefen erzählt von Pauline Gräfin de Pange. Dt. Ausg. von Willy Grabert. Hamburg 1940, S. 183–184.
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