• Albert de Broglie to August Wilhelm von Schlegel

  • Place of Dispatch: Paris · Place of Destination: Bonn · Date: 6. März [1836]
Edition Status: Newly transcribed and labelled; double collated
    Metadata Concerning Header
  • Sender: Albert de Broglie
  • Recipient: August Wilhelm von Schlegel
  • Place of Dispatch: Paris
  • Place of Destination: Bonn
  • Date: 6. März [1836]
  • Notations: Absende- und Empfangsort sowie Datum (Jahr) erschlossen. − Datierung durch die Geburt von Paul de Broglie 1834 und den Tod Albertine de Broglies 1838. In diesem Zeitraum gab es nur im Jahr 1836 einen Sonntag, den 6. März.
    Manuscript
  • Provider: Dresden, Sächsische Landesbibliothek - Staats- und Universitätsbibliothek
  • OAI Id: DE-611-38973
  • Classification Number: Mscr.Dresd.e.90,XIX,Bd.4(3),Nr.19
  • Number of Pages: 4 S. auf Doppelbl., hs.
  • Format: 19 x 12,1 cm
  • Incipit: „[1] Dimanche 6 mars
    Vous êtes bien bon de penser encore à moi, Monsieur, et moi bien coupable de ne pas [...]“
    Language
  • French
  • Latin
    Editors
  • Golyschkin, Ruth
  • Steffes, Franziska
[1] Dimanche 6 mars
Vous êtes bien bon de penser encore à moi, Monsieur, et moi bien coupable de ne pas vous avoir écrit plutot. Mais je n’ai pas grande facilité pour exécuter des tours de force surtout en latin, et il m’a été tout à fait impossible de remplir les conditions de votre défi. En revanche, je me suis donné le plaisir d’admirer la facilité avec laquelle vous aviez enchassé dans un seul vers l’éloge du
Secretaire perpétuel de l’Académie Francaise. Ce seul titre ferait presque un vers Alexandrin Francais. Du reste la façon dont vous aviez latinisé le nom très démocratique de cet illustre personnage m’a semblé aussi très ingénieuse. Il est vrai qu’il manie admirablement la parole. J’ai eu l’occasion de le connaitre [2] de plus près. Il a la bonté de me donner quelques leçons le Jeudi: nous traduisons ensemble quelques morceaux de latin et ces leçons, si on peut les appeler ainsi, ont pour moi un charme qui me rappelle d’autres leçons, un peu plus générales, à la vérité, que vous aviez alors l autrefois l’extrême bonté de me donner quelquefois, et qui, quoique j’en fusse alors bien peu digne, m’ont laissé un souvenir si agréable. Je pourrais peut être mieux les apprécier aujourd’hui, et je regrette bien vivement, maintenant que je suis entièrement absorbé dans le grec et le latin, de ne pas avoir conservé plus de souvenirs des notions générales que vous me donniez alors. L’université de Paris a conservé ses anciennes routines, le grec et le latin en sont tout: mais par une concession à l’esprit de tems, on y a joint, pour acquit de conscience, environ vingt à vingt cinq classes par an de géometrie de chimie, voire même d’Astronomie, et d’Histoire naturelle [3] mais en proclamant hautement qu’elle ne mettait ces classes qu’au second rang, et qu’elle ne les admettait même que propter duritiam temporum; aussi professeurs et élèves s’en acquittent ils avec une sublime négligence et l’on a à la fin de ses études, la satisfaction d’avoir perdu je ne sais combien d’heures et de classes, pour me servir du terme technique, à je ne sais quelle simagrée ridicule dont il n’est rien resté dans la fête. Du reste comme je ne doute pas que, d’ici à peu, nous n’ayons rendu à la France ses limites naturelles, et que Bonn, en sa qualité de sous préfecture, n’ait son collège royal et communal, vous pourrez facilement vous convaincre que je n’ai que trop raison.
Je ne sais si vous aviez connu dans votre séjour à
Paris, M. François Guinot. Sa mort a fait ici grande sensation et m’a causé beaucoup [4] d’affliction. Je m’étais beaucoup lié avec ce jeune homme pendant la dernière heure année de sa vie, et je vous assure que sa mort est une bien grande perte pour tout le monde. Il était encore bien petit garçon quand vous êtes venu à Paris, et faisait partie de ces élèves du collège que vous traitiez si mal. Mais le fait est que son esprit n’avait pris de distinction reelle que depuis quelques années. Mais il promettait beaucoup: et la malheureuse situation de son père a vivement touché le monde ou nous vivons.
Tout le monde me charge, Monsieur, de vous adresser mille compliments,
mon père, maman Mr Doudan, j’ai presque dit Mr Paul qui devient très intelligent et qui n’est pas encore au collège. Louise aussi me charge de vous dire bien des choses de sa part. Je voudrais bien que vous connaissiez son mari qui est bien bon et bien aimable, et qui la rend très heureuse. Pour [1] moi, Monsieur, je ne saurais trop vous remercier de vos bontés dont je suis plus pénétré que je ne le peux exprimer, et je vous prie d’agréer l’expression de ma sincère affection.
Albert de Broglie
écrit à Mons. De Br. 2 Avril
[1] Dimanche 6 mars
Vous êtes bien bon de penser encore à moi, Monsieur, et moi bien coupable de ne pas vous avoir écrit plutot. Mais je n’ai pas grande facilité pour exécuter des tours de force surtout en latin, et il m’a été tout à fait impossible de remplir les conditions de votre défi. En revanche, je me suis donné le plaisir d’admirer la facilité avec laquelle vous aviez enchassé dans un seul vers l’éloge du
Secretaire perpétuel de l’Académie Francaise. Ce seul titre ferait presque un vers Alexandrin Francais. Du reste la façon dont vous aviez latinisé le nom très démocratique de cet illustre personnage m’a semblé aussi très ingénieuse. Il est vrai qu’il manie admirablement la parole. J’ai eu l’occasion de le connaitre [2] de plus près. Il a la bonté de me donner quelques leçons le Jeudi: nous traduisons ensemble quelques morceaux de latin et ces leçons, si on peut les appeler ainsi, ont pour moi un charme qui me rappelle d’autres leçons, un peu plus générales, à la vérité, que vous aviez alors l autrefois l’extrême bonté de me donner quelquefois, et qui, quoique j’en fusse alors bien peu digne, m’ont laissé un souvenir si agréable. Je pourrais peut être mieux les apprécier aujourd’hui, et je regrette bien vivement, maintenant que je suis entièrement absorbé dans le grec et le latin, de ne pas avoir conservé plus de souvenirs des notions générales que vous me donniez alors. L’université de Paris a conservé ses anciennes routines, le grec et le latin en sont tout: mais par une concession à l’esprit de tems, on y a joint, pour acquit de conscience, environ vingt à vingt cinq classes par an de géometrie de chimie, voire même d’Astronomie, et d’Histoire naturelle [3] mais en proclamant hautement qu’elle ne mettait ces classes qu’au second rang, et qu’elle ne les admettait même que propter duritiam temporum; aussi professeurs et élèves s’en acquittent ils avec une sublime négligence et l’on a à la fin de ses études, la satisfaction d’avoir perdu je ne sais combien d’heures et de classes, pour me servir du terme technique, à je ne sais quelle simagrée ridicule dont il n’est rien resté dans la fête. Du reste comme je ne doute pas que, d’ici à peu, nous n’ayons rendu à la France ses limites naturelles, et que Bonn, en sa qualité de sous préfecture, n’ait son collège royal et communal, vous pourrez facilement vous convaincre que je n’ai que trop raison.
Je ne sais si vous aviez connu dans votre séjour à
Paris, M. François Guinot. Sa mort a fait ici grande sensation et m’a causé beaucoup [4] d’affliction. Je m’étais beaucoup lié avec ce jeune homme pendant la dernière heure année de sa vie, et je vous assure que sa mort est une bien grande perte pour tout le monde. Il était encore bien petit garçon quand vous êtes venu à Paris, et faisait partie de ces élèves du collège que vous traitiez si mal. Mais le fait est que son esprit n’avait pris de distinction reelle que depuis quelques années. Mais il promettait beaucoup: et la malheureuse situation de son père a vivement touché le monde ou nous vivons.
Tout le monde me charge, Monsieur, de vous adresser mille compliments,
mon père, maman Mr Doudan, j’ai presque dit Mr Paul qui devient très intelligent et qui n’est pas encore au collège. Louise aussi me charge de vous dire bien des choses de sa part. Je voudrais bien que vous connaissiez son mari qui est bien bon et bien aimable, et qui la rend très heureuse. Pour [1] moi, Monsieur, je ne saurais trop vous remercier de vos bontés dont je suis plus pénétré que je ne le peux exprimer, et je vous prie d’agréer l’expression de ma sincère affection.
Albert de Broglie
écrit à Mons. De Br. 2 Avril
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